PROGRAMME DE TRAVAIL POUR RENOVER NOTRE MODELE SOCIAL

PROGRAMME DE TRAVAIL
POUR RENOVER NOTRE MODELE SOCIAL

le détail du programme de travail remis aux partenaires sociaux le 6 juin 2017

Les trente dernières années ont modifié en profondeur, en France comme ailleurs, l’environnement économique et social dans lequel évoluent les entreprises, les salariés, les demandeurs d’emploi et plus largement tous les actifs. Elles ont rebattu les cartes de l’économie mondiale et de la division internationale du travail, ouvrant des opportunités inédites par leur ampleur et leur nature, et créant en même temps de nouvelles difficultés économiques et sociales qui appellent des réponses innovantes.
Libérer l’énergie des entreprises et des actifs tout en donnant de nouveaux moyens concrets à chacun de trouver sa place sur le marché du travail et de construire son parcours professionnel : telle est la transformation sociale profonde dont notre pays a besoin, telle est l’ambition de ce programme de travail proposé aux organisations syndicales et patronales de la nation.

Se donner les moyens d’aborder la mondialisation dans un esprit de conquête et de solidarité suppose de ne pas se replier sur soi, car ce serait le déclin et l’appauvrissement assurés. Mais il ne s’agit pas non plus d’appliquer aveuglément des recettes venues d’ailleurs : la France a une histoire et une tradition sociales qui font sa force, et c’est en y restant fidèle qu’elle retrouvera confiance en elle-même et tracera son propre chemin de réussite dans la mondialisation. Le Gouvernement veillera par exemple à ce que les règles de détachement des travailleurs en Europe définissent des garanties respectueuses de notre modèle social.
Rester fidèle à soi-même ne signifie pas pour autant rester immobile. L’accélération de l’internationalisation des échanges, les mutations technologiques massives, l’individualisation croissante du rapport au travail appellent et exigent de rénover en profondeur notre modèle économique et social, pour mieux soutenir et protéger les personnes et libérer les énergies individuelles et collectives de notre pays.

A cette fin, six grandes réformes complémentaires seront menées dans les 18 prochains mois. Elles entreront en vigueur pour certaines dès la fin de l’été. Elles viseront à :

  1. Faire converger performance sociale et performance économique, en faisant évoluer dès cet été notre droit du travail pour prendre en compte la diversité des attentes des salariés et besoins des entreprises.
  2. Redonner de façon immédiate et visible du pouvoir d’achat aux salariés, par la suppression des cotisations salariales sur l’assurance maladie et l’assurance chômage, financée par un transfert sur la cotisation sociale généralisée et effective dès le 1er janvier 2018.
  3. Renforcer efficacement les dispositifs de formation professionnelle, à travers un plan massif d’investissement pour les demandeurs d’emploi, les jeunes et les salariés dont les métiers sont appelés à évoluer rapidement. Des premières mesures concrètes seront proposées dès la rentrée 2017 et le plan sera opérationnel dès début 2018, avec un volet accompagnement renforcé. L’application numérique du compte personnel de formation, concrète, exhaustive et individualisée sera mise en oeuvre au 1er janvier 2019.
  4. Ouvrir l’assurance chômage aux démissionnaires et aux indépendants, pour permettre à chaque Français de construire ou saisir une opportunité professionnelle sans craindre de perdre toute ressource financière. La réforme sera progressivement mise en oeuvre à compter de l’été 2018.
  5. Refonder l’apprentissage pour développer massivement l’offre des entreprises en direction des moins de 25 ans et lutter efficacement contre le chômage des jeunes. La réforme entrera progressivement en vigueur pendant les deux prochaines années.
  6. Rénover notre système de retraites en le rendant plus transparent et plus juste. Par ailleurs, le dispositif de prévention et de compensation de la pénibilité sera fortement simplifié pour les entreprises et les droits des salariés seront garantis. Dans les prochaines semaines, une mission sera confiée à des personnalités reconnues pour formuler des recommandations opérationnelles afin d’atteindre cet objectif.

METHODE GENERALE : DETERMINATION ET CONCERTATION APPROFONDIE

La rénovation de notre modèle social ne pourra se faire qu’en étroite concertation avec les organisations syndicales et patronales. Pour l’ensemble de ces réformes, la méthode suivie sera celle de la concertation et de la négociation, en garantissant une égalité de disponibilité et de dialogue pour chaque partenaire.
Le programme de travail se déroulera en trois temps :

  1.  Dès les jours qui viennent et jusqu’en septembre, une concertation approfondie sur la rénovation de notre droit du travail débouchera sur la publication d’ordonnances à la fin de l’été.
  2. Dès septembre 2017, un deuxième temps sera consacré à la sécurisation des parcours professionnels pour prévenir et lutter contre le chômage (apprentissage, assurance chômage, formation professionnelle), avec l’examen au parlement d’un projet de loi dédié au printemps 2018.
  3. Un troisième temps sera consacré en 2018 à la rénovation du système de retraites.

METHODE ET CALENDRIER DE REFORMES SUR LE DROIT DU TRAVAIL

Le travail de concertation est l’une des clefs de réussite de la réforme. Celui-ci se déroule en quatre phases, permettant un examen approfondi des sujets avec chaque organisation :

1. Les réunions bilatérales conduites par le Président de la République, le Premier ministre et la ministre du travail jusqu’au 31 mai avec les organisations syndicales et patronales interprofessionnelles et multiprofessionnelles ont permis de donner un cadre à la méthode de concertation.

2. La ministre du travail a ensuite défini plus précisément, via huit réunions bilatérales ad hoc, la méthode, le calendrier et les sujets de fond. Les organisations syndicales et patronales ont été invitées à préciser les sujets qu’elles souhaitaient par ailleurs voir discutés.

3. Deux réunions, à la fois techniques et politiques, pour chacun des trois thèmes suivants et par organisation syndicale et patronale, se dérouleront du 9 juin au 21 juillet, soit 48 réunions au total, auxquelles s’ajouteront les réunions avec les organisations patronales multiprofessionnelles et des organisations syndicales non représentatives :

  •  du 9 au 23 juin se dérouleront les réunions sur le thème de la bonne articulation des niveaux de négociation et des possibilités d’intervention de la négociation collective, pour donner de la capacité d’initiative aux entreprises et aux salariés ;
  • du 26 juin au 7 juillet se dérouleront les réunions sur le thème de la simplification et du renforcement du dialogue économique et social et de ses acteurs ;
  • du 10 au 21 juillet se dérouleront les réunions sur le thème de la sécurisation des relations de travail.

4. Les concertations reprendront ensuite en août pour se clore, début septembre, avec la consultation des organismes compétents dans lesquels siègent notamment les partenaires sociaux afin de recueillir avis et observations sur les projets d’ordonnances.

Plusieurs étapes gouvernementales et parlementaires jalonneront cette première réforme structurante, caractérisée par une concertation continue tout l’été :

1. Le projet de loi d’habilitation sera à l’ordre du jour du conseil des ministres du 28 juin.

2. Il sera examiné et voté durant l’été par le Parlement.

3. Après les ultimes concertations et leur examen en Conseil des ministres, les ordonnances seront publiées d’ici la fin de l’été.

LES OBJECTIFS DE LA REFORME DU DROIT DU TRAVAIL

Conçu historiquement pour organiser les relations de travail dans les grandes entreprises industrielles, notre droit du travail ne répond plus à la diversité des entreprises, des secteurs, des parcours et des attentes des salariés. Au lieu de protéger les salariés et de soutenir l’activité des entreprises, il fragilise parfois les premiers par le décalage entre la règle et les pratiques et freine le développement des secondes, par sa difficulté à s’adapter rapidement à la réalité changeante des situations économiques, notamment dans les TPE/PME et les jeunes entreprises.

L’entreprise d’aujourd’hui n’est plus celle d’hier : s’il serait absurde de nier les divergences d’intérêt qui les traversent, les entreprises de notre temps ont peu de chances de prospérer durablement si les salariés qui s’y investissent n’y trouvent pas un sens à leur travail. La protection égale des salariés contre les aléas de la vie professionnelle, particulièrement en matière de santé, est une valeur cardinale du modèle social français, mais le principe d’égalité ne saurait conduire à l’uniformité de la norme pour tous les salariés de toutes les entreprises, quels que soient la taille et le secteur.

La protection des salariés peut en effet être mieux assurée par des normes négociées entre représentants des salariés et des employeurs dans le respect de principes intangibles fixés par la loi : c’est une voie qui ne se résigne ni à la disparition des protections, ni à l’inadaptation de nos règles aux aspirations des salariés et aux besoins des entreprises. Trouver les solutions innovantes pour articuler performance sociale et performance économique, pour allier bien-être et efficacité au travail, ne peut se faire qu’au plus près du terrain, par un dialogue entre les acteurs directement concernés, dans un cadre souple et protecteur.

Suite aux trois séries d’entretiens avec les partenaires sociaux, il est donc proposé de centrer le travail de concertation sur les trois domaines suivants :

1. La nouvelle articulation de l’accord d’entreprise et de l’accord de branche et l’élargissement sécurisé du champ de la négociation collective

La branche conserve un rôle essentiel pour réguler les conditions de concurrence et définir des garanties économiques et sociales.

Pour autant, l’entreprise est le lieu où la création de la norme sociale permet de répondre de manière pertinente aux besoins spécifiques des salariés et des entreprises en construisant le meilleur compromis au plus près du terrain.

La concertation devra définir la bonne articulation entre les deux niveaux.
De façon complémentaire, il conviendra de réfléchir aux nouveaux champs qui pourraient être ouverts à la négociation collective et aux moyens de mieux sécuriser les accords conclus et leurs modalités d’application et de validité.

La loi doit fixer bien évidemment les règles d’ordre public, de manière accessible et simplifiée, auxquelles la négociation collective ne peut déroger et les dispositions supplétives à défaut d’accord collectif.

2. Simplifier et renforcer le dialogue économique et social et ses acteurs

Notre pays est le seul à morceler la représentation des salariés en quatre instances différentes dans l’entreprise (délégués du personnel, comité d’entreprise, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, délégués syndicaux).

Cela ne favorise ni la qualité du dialogue social, qui est éclaté et alourdi, ni la capacité d’influence des représentants des salariés, qui se spécialisent sur certaines questions mais sont privés de la vision d’ensemble. Comment rendre le dialogue social plus efficace dans l’entreprise et représenter de manière adéquate la collectivité de travail, capable d’être à la hauteur des nouveaux enjeux et des nouvelles responsabilités qui lui seront confiés par l’élargissement du champ de la négociation ?

Comment mieux articuler consultation et négociation ?

Quel est le meilleur moyen pour que la stratégie de l’entreprise soit mise en oeuvre avec l’ensemble des parties prenantes ?

De même, le dialogue social dans les TPE et PME devra être facilité pour que toutes les entreprises puissent bénéficier des possibilités d’adaptation qui seront ouvertes à la négociation collective par la loi.
Enfin, un dialogue social rénové suppose des acteurs renforcés, légitimes et la reconnaissance des compétences acquises au cours des différents mandats.

3. Sécuriser les relations de travail, tant pour les employeurs que pour les salariés

Rendre les relations de travail plus prévisibles et plus sereines, oeuvrer en faveur de l’égalité professionnelle, sécuriser les nouveaux modes de travail sont autant d’axes qui doivent structurer la réforme pour redonner confiance à tous, salariés comme employeurs.

Les délais de jugement de plusieurs années dans certains conseils des prud’hommes, l’écart parfois imprévisible entre les décisions de certains conseils, conduisent à une iniquité inacceptable entre les salariés et une méfiance dommageable à tous, salariés comme employeurs, in fine préjudiciable aux relations de travail et à l’emploi.

Il convient donc de favoriser la conciliation prud’homale. De surcroît, la barémisation des dommages et intérêts – et non des indemnités de licenciement – permettra une plus grande équité et redonnera confiance aux employeurs et aux investisseurs, notamment dans les TPE PME. La crainte de l’embauche dans celles-ci est réelle, alors même que le potentiel de création d’emplois y est immense.

De même, certaines règles qui entourent le licenciement et devraient en principe protéger les salariés ne les sécurisent pas réellement. Elles constituent plutôt des freins au recrutement et conduisent parfois par leur formalisme à multiplier les contentieux. Ces règles pèsent sur l’image et l’attractivité de la France sans protéger les individus et seront donc interrogées lors de la concertation.
D’autres normes, par ailleurs, sont devenues très décalées avec les pratiques et les attentes des salariés, comme en matière de télétravail par exemple. Comment les moderniser pour mieux sécuriser les pratiques modernes qui sont déjà entrées dans les moeurs des relations de travail d’aujourd’hui ?

Enfin, la sécurisation des relations de travail passent par l’intelligibilité et l’accessibilité du droit, et les discussions porteront donc également sur les moyens de garantir l’accès de chacun par voie numérique aux normes du travail qui lui sont applicables, de façon concrète, rapide et opérationnelle.

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