jurisprudence

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 octobre 2020, 18-24.049, Inédit

Cour de cassation – Chambre sociale

  • N° de pourvoi : 18-24.049
  • ECLI:FR:CCASS:2020:SO00885
  • Non publié au bulletin
  • Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 14 octobre 2020

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles, du 05 septembre 2018

PrésidentM. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s)SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION

Audience publique du 14 octobre 2020

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 885 F-D

Pourvoi n° N 18-24.049

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 OCTOBRE 2020

La société Transdev Ile-de-France, société anonyme, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° N 18-24.049 contre l’arrêt rendu le 5 septembre 2018 par la cour d’appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l’opposant à M. S… I…, domicilié […] , défendeur à la cassation.

M. I… a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Transdev Ile-de-France, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. I…, après débats en l’audience publique du 2 septembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article L. 431-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 5 septembre 2018), M. I… a été engagé le 1er avril 2005 par la société Transdev Ile-de-France en qualité de conducteur receveur. Le 6 juin 2011, le salarié a été élu membre du comité d’entreprise. Il a été par la suite désigné membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

2. Le 14 janvier 2014, l’employeur a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le remboursement par M. I… des heures de délégation posées par ce dernier en dehors du temps de travail, ainsi que des primes et indemnités afférentes. Reconventionnellement le salarié a formé diverses demandes salariales et indemnitaires. Le syndicat national des transports (le syndicat) est intervenu volontairement à l’instance.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens du pourvoi incident du salarié, ci-après annexés

3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal de l’employeur

Enoncé du moyen

4. L’employeur fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes de remboursement des sommes payées au salarié au titre des heures de délégation, alors « qu’il appartient au titulaire d’un mandat représentatif ou syndical, qui a utilisé ses heures de délégation en dehors de l’horaire normal de travail et sollicite leur paiement comme heures supplémentaires, de rapporter la preuve que leur prise en dehors de l’horaire normal de travail est justifiée par les nécessités du mandat ; qu’en décidant, au contraire, que “l’employeur ne démontre pas que, comme le soutient M. I…, l’utilisation des heures de délégation pendant le temps de travail perturbe le fonctionnement de la société en raison de sa situation de sous-effectif chronique” et qu’il “ne démontre pas que le salarié pouvait exercer son mandat sur son temps de travail sans perturber le fonctionnement de l’entreprise”, la cour d’appel a violé l’article L. 2325-7 du code du travail en sa rédaction applicable au litige, ensemble l’article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2325-7 et L. 4614-6 du code du travail alors applicables :

5. Il résulte de ces textes que les heures de délégation sont payées comme temps de travail et que lorsqu’elles sont prises en dehors de l’horaire de travail en raison des nécessités du mandat, ces heures doivent être payées comme heures supplémentaires.

6. Pour débouter l’employeur de sa demande de remboursement des sommes correspondant aux heures de délégation prises par le salarié en dehors du temps de travail, la cour d’appel a retenu que l’employeur sollicite le remboursement de la totalité des sommes versées au titre des heures de délégation effectuées les dimanches et jours fériés pour la période du 3 février 2013 au 15 octobre 2015 alors qu’il ne conteste pas que le salarié a effectivement consacré ces heures à l’exercice de son mandat, qu’il ne démontre pas que le salarié pouvait exercer son mandat sur son temps de travail sans perturber le fonctionnement de l’entreprise et qu’il n’opère aucune distinction entre les heures qui étaient justifiées et celles qu’il estime contestables.

7. En statuant ainsi, alors qu’il appartenait au salarié de justifier que la prise d’heures de délégation les dimanches et jours fériés, en dehors de son horaire de travail, était justifiée par les nécessités de ses mandats, la cour d’appel, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen unique du pourvoi principal de l’employeur, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute la société Transdev Ile-de-France de sa demande de remboursement des heures de délégation prises par M. I… en dehors de son temps de travail, l’arrêt rendu le 5 septembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

Remet, sur ce point l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne M. I… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Transdev Ile-de-France

Il est fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d’AVOIR débouté la SA Transdev Ile-de-France de ses demandes de remboursement des sommes payées à M. I… au titre des heures de délégation et, en conséquence, d’AVOIR condamné la SA Transdev Ile-de-France à payer à M. I… la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, ainsi qu’aux dépens ;

AUX MOTIFS QUE, sur la demande de remboursement des heures de délégation posées en dehors du temps de travail par l’employeur : en application de l’article L. 2143-17 et de l’article L. 2315-3 du code du travail, les heures de délégation sont de plein droit considérées comme temps de travail et payées à l’échéance normale et l’employeur qui entend contester l’utilisation faite des heures de délégation saisit le juge judiciaire ; que lorsqu’elles sont prises en dehors de l’horaire de travail en raison des nécessités du mandat elles doivent être payées comme heures supplémentaires ; qu’en cas de contestation par l’employeur de l’usage du crédit d’heures, le salarié n’est pas dispensé, à la demande de son employeur, de préciser les activités exercées pendant le temps de sa délégation ; que l’employeur ne peut pas contester la bonne utilisation du crédit d’heures de délégation avant d’avoir payé lesdites heures ; que, sur la recevabilité de la demande : le salarié sollicite que la demande de remboursement des heures de délégation soit déclarée irrecevable au visa des dispositions de l’article 56 du code de procédure civile au motif que l’employeur n’a procédé à aucune diligence aux fins d’obtenir une résolution amiable du litige ; que le non-respect de la disposition de l’article 56 du code de procédure civile en vertu de laquelle le demandeur indique, dans son assignation, les diligences qu’il a effectuées pour obtenir une résolution amiable du litige n’est pas prescrite sous peine de nullité et n’est pas de nature à entraîner l’irrecevabilité des demandes étant observé en outre que la procédure prud’homale comporte une phase de conciliation qui a, en tout état de cause, été respectée en l’espèce ; que le salarié soulève également l’irrecevabilité de la demande de remboursement des heures de délégation au motif que ces heures n’auraient pas été préalablement réglées par l’employeur au taux applicable, ce qui rendrait sa demande de remboursement irrecevable ; que ce moyen est soulevé pour la première fois en cause d’appel, le salarié n’ayant pas en première instance soulevé le défaut de paiement des heures de délégation ; qu’il est constant que l’employeur a payé, pour la période considérée soit du 3 février au 15 octobre 2015, la somme de 6.462,67 euros au titre des heures de délégation posées en dehors du temps de travail et de 10.572,08 euros au titre des primes et indemnités afférentes à ces heures de délégation prises les dimanches et jours fériés ; que le salarié n’est donc pas fondé à soutenir que l’employeur n’a pas réglé au taux applicable les heures de délégation dont il demande le remboursement alors qu’il ne fonde cette allégation sur aucun élément ; que ce moyen d’irrecevabilité sera écarté ; que la demande doit donc être déclarée recevable ; que, sur le bienfondé de la demande : le salarié affirme que la majorité des heures de délégation était prise pendant son temps de travail mais qu’il a été contraint de poser certaines heures de délégation hors du temps de travail ; qu’il soutient que la prise des heures de délégation dont l’employeur sollicite le remboursement sont justifiées par les nécessités du mandat au motif d’une part que, eu égard à une situation de sous-effectif chronique et volontaire, l’utilisation des heures de délégation pendant le temps de travail perturbe le fonctionnement de la société et agace ses collègues qui doivent le remplacer et qu’une utilisation hors du temps de travail risquerait de lui faire perdre son mandat lors des prochaines élections et, d’autre part, que le local du comité d’entreprise se trouve dans un état d’insalubrité avancé, que son accès est impossible au-delà de 20h et que l’ordinateur ne fonctionne pas ; qu’il fait valoir enfin que la contestation formée par l’employeur ne porte pas sur la réalité des heures effectuées ; que l’employeur soutient que, si le salarié s’est bien livré à des activités en lien avec son mandat, ce dernier n’est pas en mesure de justifier des nécessités de son mandat l’ayant contraint à poser des heures de délégation en-dehors de son temps de travail, en particulier la nuit et les week-end ; qu’il précise qu’il ne remet pas en cause l’utilisation des heures de délégation mais le moment auquel elles ont été utilisées ; qu’il ajoute que le salarié est le seul sur neuf représentants du personnel à avoir pris de nombreuses heures de délégation la nuit et les dimanches ; qu’en l’espèce l’utilisation des heures de délégation ne fait pas débat dès lors que l’employeur ne conteste pas que les heures de délégation qu’il a payées ont bien été consacrées à l’exercice du mandat conformément aux justificatifs ou réponses qui lui ont été fournis par le salarié ; que l’employeur conteste seulement la pose de nombreuses heures de délégation les dimanches et jours fériés ou le soir et soutient que le salarié ne justifie pas des nécessités du mandat qui l’ont contraint à poser des heures de délégation le plus souvent en dehors du temps de travail ; que l’employeur ne démontre pas que, comme le soutient M. I…, l’utilisation des heures de délégation pendant le temps de travail perturbe le fonctionnement de la société en raison de sa situation de sous-effectif chronique ; qu’à plusieurs reprises, il a écrit au salarié pour demander au salarié des justificatifs sur l’utilisation de ses heures, mais n’a jamais contesté ses réponses ni remis en cause, avant la procédure prud’homale, les nécessités du mandat justifiant cette pratique ; que, dès lors que l’employeur sollicite le remboursement de la totalité des sommes versées au titre des heures de délégation effectuées les dimanches et jours fériés pour la période du 3 février au 15 octobre 2015 alors qu’il ne conteste pas que le salarié a effectivement consacré ces heures à l’exercice de son mandat, ne démontre pas que le salarié pouvait exercer son mandat sur son temps de travail sans perturber le fonctionnement de l’entreprise et qu’il n’opère aucune distinction entre les heures qui étaient justifiées et celles qu’il estime contestables, cette demande n’est pas fondée et elle sera rejetée ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;

1) ALORS QU’il appartient au titulaire d’un mandat représentatif ou syndical, qui a utilisé ses heures de délégation en dehors de l’horaire normal de travail et sollicite leur paiement comme heures supplémentaires, de rapporter la preuve que leur prise en dehors de l’horaire normal de travail est justifiée par les nécessités du mandat ; qu’en décidant, au contraire, que « l’employeur ne démontre pas que, comme le soutient M. I…, l’utilisation des heures de délégation pendant le temps de travail perturbe le fonctionnement de la société en raison de sa situation de sous-effectif chronique » et qu’il « ne démontre pas que le salarié pouvait exercer son mandat sur son temps de travail sans perturber le fonctionnement de l’entreprise », la cour d’appel a violé l’article L. 2325-7 du code du travail en sa rédaction applicable au litige, ensemble l’article 1353 du code civil ;

2) ALORS, subsidiairement, QUE l’employeur n’est tenu de payer les heures de délégation comme heures supplémentaires que dans l’hypothèse où leur prise en dehors de l’horaire de travail est justifiée par les nécessités du mandat ; qu’en déboutant la SA Transdev Ile-de-France de ses demandes de remboursement des sommes payées à M. I… au titre des heures de délégation, sans préciser les circonstances de faits qui auraient rendu nécessaire la prise par M. I… de ses heures de délégation en dehors de l’horaire de travail, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 2325-7 du code du travail en sa rédaction applicable au litige ;

3) ALORS, plus subsidiairement, QUE l’employeur soutenait que la prise par M. I… de ses heures de délégation en dehors de l’horaire de travail ne pouvait être justifiée par les nécessités du mandat, dès lors qu’il était le seul des neuf représentants du personnel à avoir pris de nombreuses heures de délégation la nuit et les dimanches (cf. arrêt page 6 § dernier ; conclusions d’appel page 16 § 9) ; que la société offrait de prouver, ce que les premiers juges ont constaté (cf. jugement entrepris page 4 § 1), que M. I… avait utilisé 77,90 % de ses heures de délégation en dehors de son temps de travail, cependant que la moyenne des autres élus n’était que de 1,35 % ; qu’en s’abstenant dès lors de répondre à ce moyen péremptoire des conclusions de l’employeur, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

4) ET ALORS, plus subsidiairement, QU’en énonçant, pour débouter la SA Transdev Ile-de-France de ses demandes de remboursement des sommes payées à M. I… au titre des heures de délégation, « qu’à plusieurs reprises, il [l’employeur] a écrit au salarié pour demander au salarié des justificatifs sur l’utilisation de ses heures, mais n’a jamais contesté ses réponses ni remis en cause, avant la procédure prud’homale, les nécessités du mandat justifiant cette pratique », « qu’il ne conteste pas que le salarié a effectivement consacré ces heures à l’exercice de son mandat » et qu’« il n’opère aucune distinction entre les heures qui étaient justifiées et celles qu’il estime contestables », la cour d’appel a statué par des motifs inopérants, violant l’article L. 2325-7 du code du travail en sa rédaction applicable au litige. Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. I…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. I… de sa demande de rappel de salaire au titre de la prime forfaitaire de retard ;

AUX MOTIFS QUE le salarié demande le paiement d’un rappel de salaire au titre de la prime forfait retard pour les années 2009 à 2017 ; qu’il affirme que cette prime a cessé d’être versée à compter de 1982, tout en figurant sur les fiches de paie de l’établissement de Montesson jusqu’en 2003 et de l’établissement de Nanterre jusqu’en 2014 ; que la société répond que le forfait retard, à l’origine de 3h30 suivant l’accord collectif d’établissement du 28 mars 1979 puis revalorisé à 5h par accord du 5 avril 1982 a été intégré au salaire de base conformément à l’accord NAO signé le 24 avril 1991 par les organisations syndicales représentatives ; qu’il résulte du protocole d’accord signé le 24 avril 1991 par les délégués syndicaux et le directeur du centre de Montesson produit au débat que le salaire de base inclut une indemnité forfaitaire mensuelle pour retard de trafic de 5 heures ; que dès lors que cette indemnité a été, à compter de cette date, intégrée au salaire de base, la demande du salarié à ce titre sera rejetée ;

ALORS QUE M. I… a soutenu, dans ses conclusions d’appel reprises oralement à l’audience (p. 33 à 35), que l’intégration dans le salaire de base de la prime forfait retard de 5 heures était illégale et produisait un courrier de l’inspection du travail de Nanterre daté du 20 mars 2015 indiquant qu’en application de l’article R 3243-1 du code du travail, il était impossible d’intégrer un tel forfait dans le salaire de base ; qu’en s’abstenant de répondre à ces conclusions et d’examiner le courrier de l’inspection du travail qui était visé, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. I… de sa demande de rappel de salaire au titre de l’indemnité de repas ;

AUX MOTIFS QUE le salarié demande le paiement d’une indemnité de repas sur le fondement de l’article 8 du protocole du 30 avril 1974 et fait sommation à la société de produire les plannings détaillés de ses services de 2009 à 2017 ; qu’il conteste la validité de l’intégration au salaire de base, par un accord de 1991, de la différence entre la prime spéciale qui relevait d’un accord d’établissement et la prime de repas découlant de la convention collective ; qu’il soutient que la société ne règle pas l’indemnité spéciale prévue par la convention collective ni la différence entre l’indemnité de repas et l’indemnité spéciale prétendument intégrée au salaire de base ; que l’employeur ne conteste pas les dispositions de l’article 8 du protocole de 1974, mais précise toutefois qu’au sein de l’établissement de Montesson, l’indemnité de repas unique est payée, lorsque les conditions de l’article 8 sont remplies, par le versement d’une prime « indemnité prime spéciale» d’un montant de 4,25 euros en 2017 et que la différence entre la prime de repas unique et l’indemnité prime spéciale est intégrée dans le salaire de base, conformément à l’accord du 23 janvier 1991 ; qu’il affirme que cet accord est plus avantageux pour les salariés que les dispositions de l’article 8 du protocole du 30 avril 1974 et ajoute que le salarié ne démontre pas qu’il remplissait, de 2009 à 2017 et pour chaque jour travaillé, les conditions posées par l’article 8 du protocole de 1974 ; que l’article 8 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux transports routiers de voyageurs prévoit que le personnel qui se trouve, en raison d’un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique dont le taux est fixé par le tableau joint au protocole ; qu’il précise que lorsque le personnel n’a pas été averti la veille et au plus tard à midi d’un déplacement, l’indemnité de repas unique est égale au montant de l’indemnité de repas et que si au terme d’un dépassement de l’horaire régulier la fin de service se situe après 21h30, le personnel reçoit pour son repas du soir une indemnité de repas ; que cet article précise également que ne peut prétendre à l’indemnité de repas unique le personnel dont l’amplitude de la journée de travail ne couvre pas entièrement la période comprise soit entre 11h et 14h30 soit entre 18h30 et 22h, le personnel qui dispose, sur son lieu de travail, d’une coupure d’au moins une heure, soit entre 11h et 14h30, soit entre 18h30 et 22h mais que toutefois si le personnel dispose à son lieu de travail d’une coupure ininterrompue d’au moins une heure et dont une fraction au moins égale à trente minutes est comprise soit entre 11h et 14h30, soit entre 18h30 et 22h, une indemnité spéciale est due ; le salarié sollicite le règlement de l’indemnité prévue par l’article 8 du protocole du 30 avril 1974 déduction faite des 4,15 euros réglés avec le salaire de base sous forme de prime spéciale ; qu’aux termes du protocole d’accord signé le 24 avril 1991 par les délégués syndicaux et le directeur du centre de Montesson produit au débat, le salaire de base inclut la différence entre l’indemnité de repas et l’indemnité spéciale à hauteur de 380,60 francs à la date du protocole, somme correspondant à la différence entre le montant de la prime de repas unique calculée pour chaque jours travaillé soit 22 jours par mois et le montant de l’indemnité spéciale lui-même calculé sur 22 13 jours, disposition qui est plus favorable que celle de l’accord qui limitait le versement de l’indemnité à certains jours en fonction de la durée et des horaires de travail ; que cette disposition a été rappelée aux délégués du personnel lors de la réunion du 16 novembre 2016 ; que le salarié ne produit aucun élément de nature à établir en outre qu’il aurait été privé à tort de l’indemnité de repas ;

1°) ALORS QUE selon l’article 8 du protocole d’accord du 30 avril 1974 annexé à la convention collective des transports routiers, le personnel qui se trouve, en raison d’un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique dont le taux est fixé par le tableau joint au protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages et dans le cas où, par suite d’un dépassement de l’horaire régulier, la fin de service se situe après 21 h 30, le personnel intéressé reçoit pour son repas du soir une indemnité de repas ; que pour débouter le salarié de sa demande de rappel d’indemnité de repas, la cour d’appel a relevé que la société Transdev ne contestait pas l’application de l’article 8 du protocole d’accord du 30 avril 1974 mais qu’aux termes d’un accord d’établissement daté du 24 avril 1991, la différence entre l’indemnité conventionnelle de repas et l’indemnité spéciale, calculée sur 22 jours travaillés, avait été intégrée à hauteur de 380,60 euros dans la rémunération de base ; qu’en statuant par des motifs impropres à établir que M. I… a été rempli de ses droits au titre de l’indemnité de repas pour la période concernée par sa demande, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard de l’article 8 du protocole d’accord du 30 avril 1974 annexé à la convention collective des transports routiers ;

2°) ALORS QU’en s’abstenant de répondre aux conclusions d’appel du salarié (p. 36), oralement soutenues à l’audience, qui faisait valoir que l’intégration dans le salaire de base de la différence entre l’indemnité spéciale instituée par l’accord d’établissement du 24 avril 1991 et l’indemnité de repas unique prévue par le protocole d’accord du 30 avril 1974 annexé à la convention collective des transports routiers était illégale s’agissant d’une prime de sujétion non soumise aux cotisations sociales, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE si celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de sa dette ; qu’en retenant que M. I… ne produisait aucun élément de nature à établir qu’il aurait été privé à tort de l’indemnité de repas quand il appartenait à la société Transdev, qui ne contestait pas l’application des dispositions de l’article 8 du protocole de 1974 instituant une indemnité unique de repas, d’établir qu’elle avait versé les indemnités de repas dues au salarié, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et a violé l’article 1315 du code civil devenu 1353 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. I… de ses demandes relatives aux dépassements non réglés de l’amplitude horaire ;

AUX MOTIFS QUE le salarié, qui fait valoir que l’amplitude normale de la journée de travail ne doit pas dépasser 12 heures et 14 heures pour les conducteurs en service occasionnel et que l’amplitude située entre 12 et 14 heures ouvre droit à une indemnité calculée sur la base de 65% du salaire horaire et 100% au-delà de 14 heures d’amplitude, soutient qu’il n’a pas été entièrement payé à ce titre et demande une expertise ; qu’il affirme que l’employeur limite le compteur de l’amplitude à 1,30 heures ; que l’employeur répond que l’indemnisation de l’amplitude fait l’objet de dispositions spécifiques s’agissant du transport routier de voyageurs et conteste que l’amplitude doive être rémunérée à 100% au-delà de 14 heures ; que dès lors que le salarié ne produit aucun commencement de preuve du bien-fondé de sa prétention et que l’expertise n’a pas vocation à suppléer le défaut de diligence des parties, cette demande sera rejetée ;

ALORS QUE la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l’employeur ; qu’en retenant que le salarié ne produisait aucun commencement de preuve du bien-fondé de sa prétention relative aux dépassements non réglés des amplitudes horaires et que l’expertise n’avait pas vocation à suppléer le défaut de diligence des parties, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et a violé l’article 1315 devenu 1353 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. I… de ses demandes d’indemnités pour discrimination syndicale et de suppression sous astreinte de la mention de son activité syndicale dans ses bulletins de prépaye ;

AUX MOTIFS QUE le salarié demande à la société de supprimer la mention de l’activité syndicale des salariés sur les calendriers individuels d’activité au motif qu’ ils sont un élément de présomption de discrimination syndicale et qu’en conséquence cette mention est illicite ; que l’employeur répond qu’aucun texte ne lui interdit de faire état des activités syndicales ou de représentant du personnel sur le calendrier d’activité individuel mensuel du salarié ; qu’il précise que la finalité du calendrier d’activité est sans rapport avec celle d’un entretien, que seul le salarié en a connaissance et qu’il n’est pas accessible ou transmis aux services RH des différents établissements de la société ; que la mention « DSR » sur le document incriminé qui est un calendrier d’activité individuel correspondant à « délégué syndical remplaçant » ne laisse pas supposer l’existence d’une discrimination syndicale dès lors que cette mention ne figure sur ce calendrier que pour mémoire des heures de délégation et que ce document n’est diffusé qu’au salarié concerné et en tout état de cause n’est pas diffusé au responsable relations humaines ;

ALORS QUE la mention apparente de l’activité syndicale de M. I… sur les calendriers individuels d’activité est discriminatoire ; qu’en décidant le contraire aux motifs inopérants que ces documents ne seraient pas diffusés au responsable des relations humaines et que la mention « DSR » n’y figurerait que pour mémoire des heures de délégation, la cour d’appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige.ECLI:FR:CCASS:2020:SO00885

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