jurisprudence

Toute entreprise de plus de cent salariées doit installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement.

Arrêt n°1154 du 25 novembre 2020 (19-19.996) – Cour de cassation – Chambre sociale – ECLI:FR:CCASS:2020:SO001154

CONTRAT DE TRAVAIL, EXÉCUTION

Rejet

Sommaire :
Aux termes de l’article L.1225-32 du code du travail, tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement.

Cette mise en demeure doit émaner des agents de contrôle de l’inspection du travail dans les conditions prévues par l’article R. 4721-5 du code du travail.


Demandeur(s) : syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière ; et autres

Défendeur(s) : société Meubles Ikea France, société par actions simplifiée


Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 15 mars 2019), statuant en référé, le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière a mis en demeure, le 6 avril 2018, la société Ikea, d’ouvrir des négociations pour mettre en place des salles d’allaitement dans les établissements employant plus de cent salariées.

2. Contestant le refus de l’employeur de faire droit à cette demande, le syndicat Fédération des employés et cadres de la CGT Force ouvrière, le syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d’Oise et le syndicat Commerce indépendant démocratique (les syndicats) ont saisi le président du tribunal de grande instance statuant en référé pour qu’il soit enjoint à l’employeur de mettre en place des salles d’allaitement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses troisième, quatrième et sixième branche, ci-après annexé

3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branche

Enoncé du moyen

4. Les syndicats font grief à l’arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu’un dommage imminent le fait, pour un employeur tenu en application de l’article L. 1225-32 du code du travail d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement lorsqu’il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu’en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l’effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l’installation de salles d’allaitement et en jugeant néanmoins que l’absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ;

2°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu’un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l’article L. 1225-32 du code du travail d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement lorsqu’il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu’en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l’effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l’installation de salles d’allaitement et en jugeant néanmoins que l’absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que la fédération des services CFDT, la CFE CGC SNEC, la CGT Fédération du commerce, de la distribution et des services et la FEC CGT FO avaient conclu avec la société Ikea un accord d’entreprise du 20 avril 2017 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, pour une période du 20 avril 2017 au 19 avril 2020, mettant en place dans chaque établissement un local permettant aux salariées de titrer leur lait une heure par jour, la cour d’appel a violé l’article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail ;

5°/ que constitue un trouble manifestement illicite ainsi qu’un dommage imminent, le fait, pour un employeur tenu en application de l’article L. 1225-32 du code du travail d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement lorsqu’il emploie plus de cent salariées, de méconnaître cette obligation malgré les demandes réitérées des représentants du personnel ; qu’en constatant que la société Ikea ne contestait pas avoir atteint l’effectif minimum de cent salariées dans certains de ses établissement y rendant applicables les dispositions relatives à l’installation de salles d’allaitement et en jugeant néanmoins que l’absence de mise en place de ces salles ne constituait ni un trouble manifestement illicite ni un dommage imminent, aux motifs inopérants que les syndicats parties à l’accord du 20 avril 2017 mettant en place des locaux tire-lait dans l’ensemble des établissements avant avril 2020 auraient, en signant cet accord, acté du caractère satisfactoire, sur la période visée, des engagements pris par l’entreprise, la cour d’appel a statué par des motifs inopérants et a violé l’article 809 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1225-32 et R. 1227-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l’article L. 1225-32 du code du travail, tout employeur employant plus de cent salariées peut être mis en demeure d’installer dans son établissement ou à proximité des locaux dédiés à l’allaitement.

6. Cette mise en demeure émane des agents de contrôle de l’inspection du travail dans les conditions prévues par l’article R. 4721-5 du code du travail.

7. La cour d’appel relève que la mise en demeure d’avoir à installer une salle d’allaitement émanait d’une organisation syndicale, que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi a été saisie de la question de l’absence de salles d’allaitement au sein de l’entreprise Ikea, et qu’il n’a pas été n’a pas donné suite à cette demande.

8. L’employeur n’a donc pas été mis en demeure, au sens de l’article L. 1225-32 visé ci-dessus, d’installer des locaux dédiés à l’allaitement.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, après avis donné aux parties, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. Les syndicats font grief à l’arrêt de rejeter leur demande tendant à la condamnation de la société Ikea à leur verser une certaine somme à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice portée à l’intérêt collectif de la profession du fait de l’absence de mise en place du local d’allaitement pour la période antérieure à l’assignation, alors « que la cassation à intervenir sur l’une ou l’autre des branches du premier moyen de cassation emportera par voie de conséquence et en application des dispositions de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif ayant confirmé l’ordonnance du 14 août 2018 du tribunal de grande instance de Versailles en ce qu’elle avait dit n’y avoir lieu à référé et rejeté la demande tendant à la condamnation de la société Ikea à verser au syndicat CGT Force ouvrière des employés et cadres du commerce du Val-d’Oise et à la Fédération des employés et cadres du commerce de la CGT Force ouvrière la somme de 20 000 euros pour chacun des vingt-neuf établissements dont l’effectif excède le seuil de cent salariées, à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice porté à l’intérêt collectif de la profession du fait de l’absence de mise en place du local d’allaitement pour la période antérieur à l’assignation, soit 580 000 euros. »

Réponse de la Cour

11. Le rejet du premier moyen rend sans objet le second moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;


Président : M. Cathala
Rapporteur : Mme Pécaut-Rivolier
Avocat général : Mme Laulom
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano – SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

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