jurisprudence

« l’absence de témoins » au moment de l’accident de la victime, constituait ou non des « réserves motivées » de la part de l’employeur ?

Cass. 2e civ., 28 mai 2020, n° 19-12.957. 

« LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

CIV. 2

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Cassation sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 470 F-D

Pourvoi n° B 19-12.957

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

La société Scotnet, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° B 19-12.957 contre l’arrêt rendu le 1er février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l’opposant :

1°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis, dont le siège est […] ,

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié […] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de la société Scotnet, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de Seine Saint-Denis, et l’avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 mars 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Scotnet du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 1er février 2019), la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis (la caisse) a pris en charge au titre de la législation professionnelle un accident survenu le 4 octobre 2016 et déclaré le lendemain, avec réserves, par la société Scotnet (l’employeur).

3. L’employeur a saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins d’inopposabilité de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire que la décision de prise en charge de la caisse du 8 novembre 2016 est régulière et opposable à l’employeur, alors « qu’en cas de réserves motivées de l’employeur, la caisse primaire d’assurance maladie est tenue, avant de prendre sa décision, d’adresser à l’employeur et à la victime d’un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident, ou de procéder à une enquête auprès des intéressés ; que constitue des réserves motivées de la part de l’employeur toute contestation du caractère professionnel de l’accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; que le fait pour l’employeur de se prévaloir de l’absence de témoin de l’accident constitue l’expression par celui-ci de réserves sur les circonstances de temps et de lieu dudit accident ; qu’en considérant, pour dire que la caisse primaire d’assurance maladie avait pu prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle sans instruction préalable, que l’employeur n’avait pas émis de réserves motivées, après avoir pourtant relevé que, dans sa lettre du 5 octobre 2016, la société Scotnet avait contesté la matérialité d’un fait accidentel survenu au temps et au lieu du travail en s’appuyant, notamment, sur l’absence de témoins venant corroborer les affirmations de la salariée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale :

5. Selon ce texte, en cas de réserves motivées de l’employeur ou si elle l’estime nécessaire, la caisse envoie, avant décision à l’employeur et à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie, ou procède à une enquête auprès des intéressés.

6. Pour rejeter le recours, l’arrêt constate que si la lettre de l’employeur se présente de façon formelle comme une lettre de réserves, et adopte une formulation conforme à la jurisprudence, elle se borne, cependant, à mentionner l’absence de témoin de l’accident. Il retient que ce seul élément ne saurait suffire à remettre en cause la survenance de l’accident aux temps et lieu du travail, puisqu’une part non négligeable des accidents du travail n’ont pas de témoin, et que la protection de la législation professionnelle doit néanmoins leur être accordée. Enfin, il ajoute d’une part que la lettre de l’employeur émet une pure hypothèse, à savoir que sa salariée « aurait pu se blesser ailleurs et à un autre moment qu’à son travail », de sorte que cette réserve, qu’aucun élément ne vient étayer, n’est pas motivée et d’autre part que la déclaration d’accident du travail et le certificat médical initial transmis à la caisse étaient tout à fait cohérents.

7. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’employeur avait formulé en temps utile des réserves sur les circonstances de temps et de lieu de l’accident ainsi que sur la matérialité même du fait accidentel, de sorte que la caisse ne pouvait prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. Conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu’il est fait application des articles L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DONNE ACTE à la société Scotnet du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 1er février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Déclare inopposable à la société Scotnet la décision de prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis au titre de la législation sur les risques professionnels, de l’accident survenu à Mme J… le 4 octobre 2016 ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis et la condamne à payer à la société Scotnet une somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt, et signé par lui et M. Prétot, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, et par Mme Caratini, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l’arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Scotnet

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR dit que la décision de prise en charge de la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis du 8 novembre 2016 est régulière et opposable à la société Scotnet ;

AUX MOTIFS QU’en application de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, la déclaration d’accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l’employeur, et elles ne peuvent porter que sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail. Selon la jurisprudence, ces réserves motivées s’entendent de la contestation du caractère professionnel de l’accident par l’employeur, et elles ne peuvent porter que sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; qu’en l’espèce, la lettre de la société Scotnet du 5 octobre 2016 se présente de façon formelle comme une lettre de réserves, et adopte une formulation conforme à la jurisprudence ; que cependant, la société Scotnet se borne à mentionner l’absence de témoin de l’accident dont Mme J… a été victime ; que ce seul élément ne saurait suffire à remettre en cause la survenance de l’accident aux temps et lieu du travail ; qu’une part non négligeable des accidents du travail, de par la profession exercée par les salariés accidentés, n’ont pas de témoin, et la protection de la législation professionnelle doit leur être accordée ; que la lettre de la société Scotnet émet une pure hypothèse, à savoir que sa salariée « aurait pu se blesser ailleurs et à un autre moment qu’à son travail » ; que cette réserve, qu’aucun élément ne vient étayer, n’est pas motivée ; que la déclaration d’accident du travail et le certificat médical initial transmis à la caisse étaient tout à fait cohérents : travail de nettoyage dans un hall d’immeuble, glissage et chute de la victime sur le sol qu’elle est en train de laver, blessure au poignet droit constatée le jour même, information de l’employeur également le jour même ; que c’est à bon droit que la caisse, en présence de ces présomptions graves, précises et concordantes, a pris en charge d’emblée l’accident au titre de la législation professionnelle ;

ALORS QU’en cas de réserves motivées de l’employeur, la caisse primaire d’assurance maladie est tenue, avant de prendre sa décision, d’adresser à l’employeur et à la victime d’un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident, ou de procéder à une enquête auprès des intéressés ; que constitue des réserves motivées de la part de l’employeur toute contestation du caractère professionnel de l’accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; que le fait pour l’employeur de se prévaloir de l’absence de témoin de l’accident constitue l’expression par celui-ci de réserves sur les circonstances de temps et de lieu dudit accident ; qu’en considérant, pour dire que la caisse primaire d’assurance maladie avait pu prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle sans instruction préalable, que l’employeur n’avait pas émis de réserves motivées, après avoir pourtant relevé que, dans sa lettre du 5 octobre 2016, la société Scotnet avait contesté la matérialité d’un fait accidentel survenu au temps et au lieu du travail en s’appuyant, notamment, sur l’absence de témoins venant corroborer les affirmations de la salariée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale. »

« LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

CIV. 2

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Cassation sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 470 F-D

Pourvoi n° B 19-12.957

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

La société Scotnet, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° B 19-12.957 contre l’arrêt rendu le 1er février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l’opposant :

1°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis, dont le siège est […] ,

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié […] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de la société Scotnet, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie de Seine Saint-Denis, et l’avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 mars 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Scotnet du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 1er février 2019), la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis (la caisse) a pris en charge au titre de la législation professionnelle un accident survenu le 4 octobre 2016 et déclaré le lendemain, avec réserves, par la société Scotnet (l’employeur).

3. L’employeur a saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins d’inopposabilité de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire que la décision de prise en charge de la caisse du 8 novembre 2016 est régulière et opposable à l’employeur, alors « qu’en cas de réserves motivées de l’employeur, la caisse primaire d’assurance maladie est tenue, avant de prendre sa décision, d’adresser à l’employeur et à la victime d’un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident, ou de procéder à une enquête auprès des intéressés ; que constitue des réserves motivées de la part de l’employeur toute contestation du caractère professionnel de l’accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; que le fait pour l’employeur de se prévaloir de l’absence de témoin de l’accident constitue l’expression par celui-ci de réserves sur les circonstances de temps et de lieu dudit accident ; qu’en considérant, pour dire que la caisse primaire d’assurance maladie avait pu prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle sans instruction préalable, que l’employeur n’avait pas émis de réserves motivées, après avoir pourtant relevé que, dans sa lettre du 5 octobre 2016, la société Scotnet avait contesté la matérialité d’un fait accidentel survenu au temps et au lieu du travail en s’appuyant, notamment, sur l’absence de témoins venant corroborer les affirmations de la salariée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale :

5. Selon ce texte, en cas de réserves motivées de l’employeur ou si elle l’estime nécessaire, la caisse envoie, avant décision à l’employeur et à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie, ou procède à une enquête auprès des intéressés.

6. Pour rejeter le recours, l’arrêt constate que si la lettre de l’employeur se présente de façon formelle comme une lettre de réserves, et adopte une formulation conforme à la jurisprudence, elle se borne, cependant, à mentionner l’absence de témoin de l’accident. Il retient que ce seul élément ne saurait suffire à remettre en cause la survenance de l’accident aux temps et lieu du travail, puisqu’une part non négligeable des accidents du travail n’ont pas de témoin, et que la protection de la législation professionnelle doit néanmoins leur être accordée. Enfin, il ajoute d’une part que la lettre de l’employeur émet une pure hypothèse, à savoir que sa salariée « aurait pu se blesser ailleurs et à un autre moment qu’à son travail », de sorte que cette réserve, qu’aucun élément ne vient étayer, n’est pas motivée et d’autre part que la déclaration d’accident du travail et le certificat médical initial transmis à la caisse étaient tout à fait cohérents.

7. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’employeur avait formulé en temps utile des réserves sur les circonstances de temps et de lieu de l’accident ainsi que sur la matérialité même du fait accidentel, de sorte que la caisse ne pouvait prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. Conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu’il est fait application des articles L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DONNE ACTE à la société Scotnet du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 1er février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Déclare inopposable à la société Scotnet la décision de prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis au titre de la législation sur les risques professionnels, de l’accident survenu à Mme J… le 4 octobre 2016 ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis et la condamne à payer à la société Scotnet une somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille vingt, et signé par lui et M. Prétot, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, et par Mme Caratini, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l’arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Scotnet

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué D’AVOIR dit que la décision de prise en charge de la caisse primaire d’assurance maladie de Seine-Saint-Denis du 8 novembre 2016 est régulière et opposable à la société Scotnet ;

AUX MOTIFS QU’en application de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, la déclaration d’accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l’employeur, et elles ne peuvent porter que sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail. Selon la jurisprudence, ces réserves motivées s’entendent de la contestation du caractère professionnel de l’accident par l’employeur, et elles ne peuvent porter que sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; qu’en l’espèce, la lettre de la société Scotnet du 5 octobre 2016 se présente de façon formelle comme une lettre de réserves, et adopte une formulation conforme à la jurisprudence ; que cependant, la société Scotnet se borne à mentionner l’absence de témoin de l’accident dont Mme J… a été victime ; que ce seul élément ne saurait suffire à remettre en cause la survenance de l’accident aux temps et lieu du travail ; qu’une part non négligeable des accidents du travail, de par la profession exercée par les salariés accidentés, n’ont pas de témoin, et la protection de la législation professionnelle doit leur être accordée ; que la lettre de la société Scotnet émet une pure hypothèse, à savoir que sa salariée « aurait pu se blesser ailleurs et à un autre moment qu’à son travail » ; que cette réserve, qu’aucun élément ne vient étayer, n’est pas motivée ; que la déclaration d’accident du travail et le certificat médical initial transmis à la caisse étaient tout à fait cohérents : travail de nettoyage dans un hall d’immeuble, glissage et chute de la victime sur le sol qu’elle est en train de laver, blessure au poignet droit constatée le jour même, information de l’employeur également le jour même ; que c’est à bon droit que la caisse, en présence de ces présomptions graves, précises et concordantes, a pris en charge d’emblée l’accident au titre de la législation professionnelle ;

ALORS QU’en cas de réserves motivées de l’employeur, la caisse primaire d’assurance maladie est tenue, avant de prendre sa décision, d’adresser à l’employeur et à la victime d’un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident, ou de procéder à une enquête auprès des intéressés ; que constitue des réserves motivées de la part de l’employeur toute contestation du caractère professionnel de l’accident portant sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ; que le fait pour l’employeur de se prévaloir de l’absence de témoin de l’accident constitue l’expression par celui-ci de réserves sur les circonstances de temps et de lieu dudit accident ; qu’en considérant, pour dire que la caisse primaire d’assurance maladie avait pu prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle sans instruction préalable, que l’employeur n’avait pas émis de réserves motivées, après avoir pourtant relevé que, dans sa lettre du 5 octobre 2016, la société Scotnet avait contesté la matérialité d’un fait accidentel survenu au temps et au lieu du travail en s’appuyant, notamment, sur l’absence de témoins venant corroborer les affirmations de la salariée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article R. 441-11, III, du code de la sécurité sociale. »

 

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