Décret n° 2022-1712 : mise en œuvre du passeport de prévention

Décret n° 2022-1712 du 29 décembre 2022 relatif à l’approbation de la délibération du comité national de prévention et de santé au travail du conseil d’orientation des conditions de travail fixant les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur

 

La Première ministre,
Sur le rapport du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion,
Vu le code monétaire et financier, notamment son article L. 518-3 ;
Vu le code du travail, notamment ses articles L. 4141-5, L. 4641-2-1 et R. 4641-8 ;
Vu la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, notamment son article 6 ;
Vu la délibération du comité national de prévention et de santé au travail du 24 juin 2022, précisée par délibération du 13 juillet 2022 ;
Vu l’avis du Conseil d’orientation des conditions de travail en date du 19 octobre 2022 ;
Vu l’avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et des consignations en date du 16 novembre 2022,
Décrète :

I. – La décision du comité national de prévention et de santé au travail relative aux modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur prévue à l’article L. 4141-5 du code du travail est approuvée dans sa rédaction figurant en annexe du présent décret, à l’exception des dispositions qui prévoient un arrêté pour fixer :
1° Les « modalités et conditions d’accès au passeport » « (dont l’accord total, l’accord partiel, ou le refus d’accès) » ;
2° Les « informations recensées dans le passeport de prévention ».
II. – La notification électronique automatique prévue à l’avant dernier alinéa du point 2 de la délibération en annexe au présent décret, relatif aux parties intéressées au passeport de prévention, ne s’applique qu’aux formations organisées à l’initiative de l’employeur.
III. – Le salarié peut donner son accord pour un accès, total ou partiel, par son employeur, au passeport le concernant, ou lui refuser cet accès. Les modalités de cet accord et les conditions de cet accès sont précisées par arrêté du ministre chargé du travail.

Le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion est chargé de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

ANNEXE

Conseil d’Orientation des Conditions de Travail
Secrétariat général du COCT, 13 juillet 2022

Procès-verbal de la délibération du comité national de prévention et de santé au travail du 13 juillet 2022 portant sur la proposition relative aux modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à disposition de l’employeur

Le comité national de prévention et de santé au travail (CNPST) du Conseil d’orientation des conditions de travail est appelé à déterminer « les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur » en application de l’article L. 4141-5 du code du travail.
L’objet de la délibération porte sur la proposition transmise par les partenaires sociaux intitulée :
« Passeport de prévention : propositions des partenaires sociaux » présenté le 24 juin au CNPST et amendé à la suite de cette réunion du Comité.
Les modalités de la délibération sont fixées au troisième alinéa de l’article R. 4641-4 du code du travail, ainsi qu’aux trois derniers alinéas de l’article R. 4641-8 du même code.
Etaient présents :
Pour le MEDEF : Mme Renaud Giroudet et Mme Carole Panozzo Pour la CPME : M. le docteur Thillaud et Mme Sophie Capron Pour l’U2P : M. Philippe Goj M. Jean-Baptiste Moustié
Pour la CFDT : Mme Catherine Pinchaut et Pierre-Gaël Loréal Pour la CGT : M. Olivier Perrot
Pour la CGT-FO : M. Maxime Raulet
Pour la CFE-CGC : Mme le docteur Anne-Michèle Chartier Pour la CFTC : M. Frédéric Fischbach et Mme Frédérique Parrot Pour la CCMSA : Mme Hanane Mouftadi
Pour le ministère de l’agriculture : M. Jérôme Couët
Pour le Ministère du travail : Mme Amel Hafid et M. Nicolas Bessot.
Le président, M. Dominique GIORGI, ayant constaté que le quorum était atteint, a soumis pour adoption la proposition qui avait été transmise aux membres du comité national de prévention et de santé au travail en même temps que la convocation à la séance du Comité.
A l’exception de la Confédération générale du travail qui s’est abstenue, les partenaires sociaux ont approuvé la proposition qui leur a été soumise pour approbation.
Les partenaires sociaux ont tenu à préciser qu’ils avaient manifesté dans la proposition susmentionnée leur souhait que certaines dispositions du décret soient précisées par arrêté. Ils rappellent cependant qu’il revient au pouvoir réglementaire de prendre ces dispositions spécifiques.
Suite à la proposition du comité national de prévention et de santé au travail, il revient ainsi à l’autorité administrative compétente de mettre en œuvre par tout moyen, y compris par voie réglementaire les propositions des partenaires sociaux.
Le document relatif au passeport-prévention adoptée par les partenaires sociaux est annexé au présent procès-verbal de délibération.
Fait à Paris, le 13 juillet 2022.
Le Secrétaire général du Conseil d’orientation des conditions de travail
Philippe Garabiol
Le comité national de prévention et de santé au travail est composé des organisations syndicales (CFDT, CGT, CGT-FO, CFTC, CFE-CGC) et professionnelles (MEDEF, CPME, U2P) représentatives au niveau national et interprofessionnel, de l’Etat (ministère chargé du travail – DGT- et ministère chargé de l’agriculture -SAFSL-), de la CNAM (direction des risques professionnels) et de la CCMSA (SST MSA).

Passeport de prévention
Propositions des partenaires sociaux

Le document relatif au passeport de prévention présenté par les partenaires sociaux le 24 juin 2022 au CNPST a fait l’objet d’un consensus1 des membres votants du CNPST au sens de l’article R. 4641- 8 du code du travail. Il a été décidé, lors de ce dernier CNPST, de l’ajuster dans les meilleurs délais pour prendre en compte les remarques juridiques faites par la DGT.

L’ANI du 9 décembre 2020 prévoit la création d’un passeport de prévention pour les salariés en particulier pour éviter « les formations surabondantes et parfois même redondantes » tout en rappelant l’importance du sujet de la formation dans la démarche de prévention des risques professionnels.
La loi du 2 août 2021 est venue préciser les modalités de déploiement du passeport de prévention au-delà de ce qu’avaient prévu les partenaires sociaux en prévoyant que le passeport prévention soit intégré au passeport d’orientation, de formation et de compétences lui-même intégré au système d’information du compte personnel de formation. C’est à ce titre que la Caisse des dépôts et consignations (CDC) assurera la gestion du passeport de prévention à l’instar du passeport d’orientation, de formation et de compétences.
Par ailleurs, la loi a modifié les objectifs visés par l’ANI et l’esprit de ce dispositif en conduisant à faire du passeport de prévention une nouvelle obligation pour les employeurs.
C’est dans ce contexte contraint et pour répondre à une demande de la loi du 2 août 2021 que les partenaires sociaux membres du CNPST sont amenés à proposer « les modalités de mise en œuvre du passeport prévention et de sa mise à disposition de l’employeur ».
Les documents de la caisse des dépôts et consignations présentés lors du CNPST sont un appui aux travaux des partenaires sociaux et leur fournissent quelques repères :

– Le passeport d’orientation, de formation et de compétences serait effectif fin 2022 avec des évolutions fonctionnelles en 2023 et 2024,
– Le passeport prévention se matérialisera d’abord par un site d’information livré en octobre 2022 puis par une ouverture effective en avril 2023. Cette situation implique :
– une mise en œuvre progressive de ce dispositif tant sur son architecture que sur son contenu (périmètre des formations visées),
– une progressivité, en parallèle, des exigences qui pourront être demandées aux employeurs,
– de prendre en compte la question de compatibilité technique des échanges d’informations entre les entreprises, les organismes de formation, et le site Passeport formation ; cette compatibilité ne pourra pas être immédiate pour toutes les entreprises ou OF car devra nécessiter des développements informatiques permettant un flux machine to machine

1 Abstention de la CGT.

Au regard des différentes questions posées aux partenaires sociaux pour la mise en place du passeport de prévention, ces derniers retiennent les orientations suivantes :

1/ Le passeport de prévention devra rester un outil au service des employeurs et des salariés ; il doit faciliter la circulation entre eux de l’information sur les formations suivies, les compétences acquises et les certificats obtenus.
Dans cette logique, le passeport ne doit pas :

– Être un moyen de contrôle des compétences des salariés.
– Constituer un prérequis obligatoire à tout recrutement des salariés.
– Avoir pour finalité d’être un outil de contrôle des formations dispensées par l’employeur. Comme ce dernier renseigne le passeport de prévention, la priorité devra être donnée à un accompagnement de ces derniers, en particulier pour les TPE/PME.
– L’employeur reste libre de garder les supports qu’il utilise actuellement pour justifier de la réalisation des formations en cas de contrôle.
– Être confondu avec les droits du salarié attachés au CPF même s’il est intégré dans le même système d’informations. L’utilisation des droits CPF acquis par les salariés reste à l’unique appréciation de ces derniers.

2/ Les parties intéressées au passeport de prévention

– Les titulaires du passeport de prévention.

Au titre des articles L. 4141-5 et L. 4111-5 du code du travail, le passeport de prévention vise les travailleurs et les demandeurs d’emploi.
Le passeport est un outil géré par le salarié, c’est à ce dernier d’apprécier ce qu’il rend consultable/communicable par un employeur ou son délégataire, y compris :

– Les données que l’employeur n’y a pas versées dans le passeport,
– les formations que le titulaire du passeport a suivies de sa propre initiative et telles que visées au 4/ du présent document.

Les modalités et conditions d’accès au passeport seront fixées par arrêté (dont l’accord total, l’accord partiel, ou le refus d’accès)

– Les employeurs ou leurs délégataires.
– Plusieurs situations sont à distinguer selon le statut juridique de l’employeur : l’entreprise de droit commun, les entreprises de travail temporaire, les entreprises étrangères intervenant en France.
– Pour optimiser la visibilité de l’employeur sur les formations qu’il a dispensées ou fait réaliser par un organisme de formation, l’employeur pourra activer un espace dédié d’information auquel seul lui ou son délégataire pourra accéder.
– Les organismes de formation qui ont l’obligation de renseigner le passeport prévention pour les formations qu’ils dispensent (article L. 4141-5 CT alinéa 1er dans sa version applicable au plus tard au 1er octobre 2022)
– Lorsqu’une formation est assurée par un organisme de formation externe à l’entreprise, cet organisme alimente le Passeport de prévention du titulaire pour la formation qu’il aura assurée. Cette alimentation portera notamment sur l’attestation de suivi de formation, ou le cas échéant sur le certificat de réussite.
– Pour les formations débouchant sur une certification, l’alimentation par l’organisme certificateur du passeport d’orientation, de formation et de compétences du salarié entrainera l’alimentation, par ricochet, du passeport de prévention.
– Dans ce cadre, les organismes concernés informeront l’employeur par tout moyen qu’ils ont effectivement alimenté le passeport. Cela se traduira par la mise en place d’un système de notification automatique sur l’espace dédié visé supra.
– Le salarié est aussi informé de l’alimentation de son passeport par l’organisme de formation ou de certification par le biais d’une notification électronique.

3/ Le périmètre du contenu du passeport de prévention est composé :

– Des attestations, certificats et diplômes dispensés en interne au sein de l’entreprise, y compris à l’étranger ou en externe par le biais d’organisme de formation.

Ces attestation, certificat ou diplôme permettent de s’assurer de la bonne réalisation de la formation dans les conditions fixées par la réglementation du code du travail ou garanties par tout autre dispositif de validation.

– D’informations recensées dans le passeport qui relèvent de 5 catégories :
1. Les données relatives à l’identification de l’employeur ;
2. Les données relatives à l’identification de l’organisme de formation ;
3. Les données relatives à l’identification du titulaire du passeport de prévention ;
4. Les données relatives aux attestations, certificats et diplômes obtenus par le titulaire du passeport de prévention dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail ;
5. Les certificats en santé et sécurité au travail obtenus par le titulaire du passeport de prévention et recensées dans son passeport d’orientation, de formation et de compétences mentionné au second alinéa du II de l’article L. 6323-8 du code du travail. Les informations recensées dans le passeport de prévention seront fixées par arrêté

4/ Le passeport doit se développer de façon progressive dans la mesure où il ne pourra pas intégrer d’emblée l’ensemble des « attestations, certificats et diplômes »
Il est donc proposé d’intégrer dans un premier temps les formations transférables c’est-à-dire des formations qui peuvent être transférées aisément d’une entreprise à une autre, ce qui vise les formations en santé-sécurité visées par le code du travail et réalisées par des organismes de formation externes ou réalisées en interne par l’entreprise.
Ces premières formations viseront dans un premier temps les formations obligatoires spécifiques au titre du code du travail (Amiante, Travaux sous tension, travaux en hauteur, travaux hyperbares, appareils de levage ou équipement de travail mobile auto-moteur …), exceptées les formations liées à la prise de poste de travail et à son évolution, les « Formations non réglementées avec objectif précisé par la réglementation pour des postes qui nécessitent l’habilitation par l’employeur » (CACES, risque pyrotechnique), et pas l’habilitation elle-même.
Dans un objectif de rationalisation/optimisation de la formation professionnelle, l’attestation susvisée doit permettre, lorsque le travailleur le souhaite, de renseigner le nouvel employeur afin de lui permettre d’adapter les formations à mettre en œuvre, en tant que de besoin.

L’alimentation du passeport de prévention ne concerne pas les formations qui ont été dispensées antérieurement à la mise en œuvre effective de ce dispositif. Le travailleur conserve néanmoins la faculté d’y intégrer ces formations suivies antérieurement.
Les partenaires sociaux proposent que le cahier des charges prévoie une clause de revoyure qui permettra de faire une évaluation de cette étape de « mise en route » du passeport prévention.

Fait le 29 décembre 2022.

Élisabeth Borne
Par la Première ministre :

Le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion,
Olivier Dussopt

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